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Le cas Huawei met l’Europe sous pression

Le cas Huawei met l’Europe sous pression

Alors que les Etats-Unis menacent de sanctions les pays européens tentés d’adopter la technologie de téléphonie mobile 5G de la multinationale chinoise, l’Union ne dispose pas d’acteurs suffisamment forts pour s’imposer face à ces deux géants.

La guerre froide que se mènent les Etats-Unis et la Chine pour le leadership technologique risque de faire d’importants dégâts collatéraux dont la principale victime pourrait bien être l’Europe. Marché convoité par les deux belligérants, elle ne dispose pas d’acteurs suffisamment forts pour s’imposer face à ces deux géants. Son principal atout est sa matière grise et ses start-up, que Chinois comme Américains n’hésitent plus à financer. Le nombre de centres de recherche en intelligence artificielle ou en science des données que les deux puissances financent sur le Vieux Continent montre qu’elles ne regardent pas à la dépense pour séduire les meilleurs experts européens et les rallier à leur camp.

L’affaire Huawei a mis l’Europe dans une situation encore plus inconfortable. Toujours soucieux de protéger la prédominance de leurs entreprises, à commencer par ses champions de l’Internet, les Etats-Unis n’ont pas hésité à menacer l’Allemagne et la Hongrie de moins collaborer avec elles si d’aventure des produits chinois venaient à être installés dans leurs infrastructures ; entendre : si vous adoptez la nouvelle technologie de téléphonie mobile 5G de Huawei… « Les Etats-Unis s’en prennent à Huawei car c’est la seule entreprise chinoise qui soit vraiment internationale. Elle réalise la moitié de son chiffre d’affaires en dehors de Chine, ce qui n’est pas le cas de Tencent ou d’Alibaba, par exemple. Mais surtout, si Huawei est interdit en Europe, le continent va prendre douze à vingt-quatre mois de retard dans le déploiement de la technologie 5G, ce qui est critique pour toutes les entreprises. De fait, cette interdiction redonnerait un avantage concurrentiel aux entreprises américaines sur le marché européen… », explique François Candelon, associé et directeur général du Boston Consulting Group (BCG) à Paris.

« Il faudrait créer un marché unique du numérique »

Conscients des enjeux, les dirigeants européens de Huawei multiplient depuis quelques mois les déclarations de bonnes intentions. La société promet de dépenser 40 milliards de dollars (37,4 milliards d’euros) en Europe pour s’approvisionner au cours des cinq prochaines années. Ne pouvant plus se fournir aux Etats-Unis, où elle dépensait quelque 10 milliards de dollars par an, elle se trouve de nouveaux fournisseurs en Chine, en Asie et en Europe. Avant Noël, Liang Hua, son président, déclarait à l’AFP que Huawei envisageait d’ouvrir une usine en Europe pour y fabriquer ses propres composants pour la technologie 5G, mais que d’ores et déjà, toute la chaîne d’approvisionnement de cette technologie ne dépendait plus des fournisseurs américains.

Paru dans Le Monde